
La 2ème session de la cour d’assises de Dakar a été clôturée le vendredi 23 avril 2010 au palais de justice. L’audience qui s’est tenue dans la salle 7 de 08h à 23h s’est terminée sur une note très amère pour les accusés. La perpétuité a été requise pour quatre accusés de la bande et l’acquittement pour les deux autres, après sept ans de détention provisoire.
La bande organisée de délinquants qui écumait certains quartiers de Dakar tels que : Grand- Yoff, Liberté 6, Scat urbam, Castor, Derklé, Usine ben tally et les Parcelles assainies, vient d’être édifiée sur son sort par la Cour d’assises. Mme le Président du jury en collaboration avec les conseillers a requis les travaux forcés à perpétuité pour Jean Mendy, Gora Bâ alias Mame Gor, Malang Faty, Sény Mbengue et Serigne Bamba Ndiaye contre qui un mandat d’arrêt international a été lancé. Rappelons que ce dernier qui se trouve actuellement en Italie avait bénéficié d’une liberté provisoire. Cependant heureux ont été Amadou Wane dit « toucou » et Amadou Diol qui ont bénéficié d’un acquittement après une longue détention de sept ans.
Le jury a suivi le réquisitoire de l’avocat général Me Adama Gueye qui avait demandé une sanction très sévère à l’endroit du gang. Rappelons que les faits remontent avant 2003, année de leur mandat de dépôt. En effet selon les procès verbaux de l’enquête policière, cette bande a eu à commettre des vols en réunion pendant la nuit avec violence portant essentiellement sur des mobylettes, des téléphones portables, des scooters au bord d’un 4X4 de marque « Jeep Cherokee »
Parmi les victimes on note : Pape Hugo Seck, Abdou Bara Dieng, Abdou Khadre Dieylani Bâ, Moussa Doucouré, Eric Correa, Aly Ngalam, Ndeye Baffou Tounkara, Laure Marie Albert, Gnima Mane et Coura Soumaré. Toujours selon l’enquête policière leur modus operandi consistait à se retrouver au bar dénommé « Réseau » avant d’aller à l’assaut de leurs victimes, munis d’une arme à feu, de coupe-coupe et de couteaux. Leurs arrestations résultent d’une dénonciation de Serigne Bamba Ndiaye, un membre de la bande, sous la conduite de son père.
Outre ces crimes perpétrés, les accusés sont enfoncés par l’enquête de moralité faite sur leurs personnes. Une enquête qui révèle que Jean Mendy est « un vrai caïd » comme il ressort des propos de l’avocat général dans l’examen des résultats de cette enquête. L’enquête a aussi révélé un paradoxe selon lequel la quasi-totalité des accusés vivent dans des conditions acceptables, ce qui ne leur permettaient pas de facto à verser dans l’acception selon laquelle « la misère peut mener à verser dans le milieu des malfrats » de l’avis du ministère public. Au finish de son réquisitoire l’avocat lance la formule contraire à celle d’un de ses anciens collègues qui disait après les débats contradictoires « M. le président je vous livre ce prisonnier pieds et mains liés ». « Cependant moi, je vous laisse Monsieur la Présidente, la société troublée, terrorisée dans sa quiétude par cette bande qui a sciemment versé dans la délinquance et je demande la condamnation à perpétuité pour Jean Mendy, Serigne Bamba, Ndiaye, Sény Mbengue et Gora Bâ et l’acquittement pour Amadou Diol et Amadou Wane».
Malgré des plaidoiries d’une rare éloquence, bien articulées autour des vices de l’affaire qui ont porté essentiellement sur l’imputabilité des faits incriminés aux accusés et la crédibilité du dénonciateur, l’issue a été malheureuse. Par ailleurs les hommes en robes noires ont rivalisé d’éloquence et de tact dans leurs démarches. Ils se sont mus en penseurs, en philosophes surtout en la personne de Me Jacques Baudin qui a fasciné l’auditoire lorsqu’il évoquait la fable selon laquelle « cette affaire c’est comme l’ombre du cocher sur l’ombre de la calèche avec l’ombre de la rêne et qui mène vers des destinations ombrageuses » pour montrer combien le dossier était à la fois confus et touffu.
Après une longue attente d’à peine trois heures qui a vu les confrères jeter leurs dévolues sur des cacahuètes pour dissiper leur faim, la sentence est tombée à 23h. Le jury a fait fi des observations des conseillers en suivant le réquisitoire de l’avocat général en toute lettre. Cependant Monsieur la Présidente a clôt cette deuxième session tout en signifiant aux condamnés qu’ils ont 15 jours pour pouvoir faire appel. Toutefois l’espoir de recouvrer la liberté ou de bénéficier d’un allègement de la peine demeure, pour ces prisonniers.